mardi 5 novembre 2024

RASA (Schmidt Astrographe)

RASA = Rowe-Ackermann Schmidt Astrographe

Pour (bien) comprendre ce que R.A.S.A. signifie il faut le lire de droite à gauche.

Astrographe 

L’Origin est un astrographe, pas un télescope, car il n’a pas d’oculaire et ne permet donc pas d'observation visuelle. Il ne permet de faire que des photographies. Cette absence d’oculaire n’est pas juste une simplification mais une impossibilité du système optique sur lequel il est basé : La chambre de Schmidt.

Schmidt

Il est impossible de faire de l’astronomie sans entendre parler de télescopes Schmidt-Cassegrain et, dans une moindre mesure, de la chambre de Schmidt.

Bernhard Schmidt (1879 - 1935)  était un physicien/opticien allemand fabricant de lentilles et de miroirs destinés aux astronomes amateurs, puis aux professionnels. A l'époque de Schmidt (les années 1920) les télescopes avaient une couverture de 1 ou 2° (comme l’Origin), ce qui rendait l’exploration systématique du ciel fastidieuse.

La première idée de Schmidt a été de remplacer le miroir parabolique utilisé jusqu’alors par un miroir sphérique concave (plus facile à construire) ce qui élimine les deux aberrations liées aux miroirs paraboliques : la coma sagittale, et l’astigmatisme(1) mais au prix de l’aberration sphérique. Et c’est là qu’en 1930, Schmidt a la seconde idée (de génie) : Installer une fine lentille asphérique (on dit aujourd’hui une lame de Schmidt) à l’entrée du tube pour corriger l’aberration sphérique. Le résultat est ce que l’on appelle une chambre de Schmidt puisque l’espace entre la lame et le miroir est clos. L’image se forme à  mi-chemin entre le miroir sphérique et la lame correctrice, donc dans la chambre de Schmidt, ce qui complique l'observation visuelle. Il faut soit mettre l’observateur dans la chambre (ce qui a été fait mais implique un diamètre de plusieurs mètres) soit y mettre un appareil photo. D’ailleurs les anglophones utilisent le terme Schmidt Camera (le mot anglais camera ne signifiant pas caméra mais appareil photo).

(1) Un miroir sphérique concave n'est pas strictement stigmatique, mais on considère qu'il l'est si tous les rayons incidents sont quasi perpendiculaires à la surface du miroir, ce qui est le cas pour un télescope. 


La représentation ci-contre de la lame de Schmidt, vue de profil, exagère énormément l'ondulation puisque le creux est de l'ordre de 10 μm (1 μm = 1 micromètre = 1 millième de millimètre).



La chambre de Schmidt est l'espace clos entre la lame de Schmidt et le miroir. 

Si R est le rayon de courbure du miroir sphérique concave, le plan focal est à R/2 à l'avant du miroir, et en principe on place la lame correctrice à la distance R du miroir c'est à dire que le centre de la lame et le centre de la sphère qui soustend le miroir sont confondus.


L'idée d'utiliser un miroir sphérique et de le corriger par une lame de Schmidt a été étendu aux télescopes existants disposants d'un oculaire. Ce qui a donné le Schmidt-Newton (oculaire sur le coté en haut du télescope) et surtout le Schmidt-Cassegrain (oculaire à l'arrière du télescope).

La courbure du plan focal est la même que celle du miroir. A l’époque des négatifs photographiques sur gélatine ce n’était pas dramatique. Mais aujourd’hui à l’ère des capteurs plats en silicium c’est un problème. Yrjö Väisälä avait proposé dés 1934 une solution pour aplanir le plan focal (mais avec des aberrations chromatiques).

Rowe-Ackermann 

Ce n'est qu'au début des années 2010 que, sous la houlette de Celestron, interviennent David Rowe puis  Mark Ackermann avec pour objectif de proposer une chambre de Schmidt (donc un astrographe) adaptée aux capteurs numériques pour le marcher des astronomes amateurs. Dans les années 70 Celestron avait déjà proposé deux chambres de Schmidt (5" et 8" f/1.5) mais adaptée aux  films argentiques.

Mark Ackermann 

David Rowe 

En 2012 David Rowe est consultant chez Celestron et directeur technique de PlaneWave (fondé en 2006 par l'ancien directeur technique de Celestron, Richard Hedrick). Il travaille avec Celestron sur cette chambre de Schmidt. Après plusieurs itérations Rowe propose un design qui permet :

  • de garder les lames de Schmidt que produit déjà Celestron pour ses télescopes Schmidt-Cassegrain de 11 pouces, 
  • d’aplanir le plan focal,
  • de déporter le plan focal hors de la chambre de Schmidt, à l’avant de la lame correctrice,
  • l’utilisation d’un appareil photo numérique (back-focus de 55mm) et full-rame (24x36mm)
Le design de Rowe est soumis à Mark R. Ackermann (du Sandia National Laboratories et de l’Université du Nouveau Mexique).  Avec son point de vue d'astronome et d'universitaire Ackermans optimise le design en étendant le spectre, en ajoutant une quatrième lentille correctrice au correcteur de champ, en augmentant le diamètre et diverses autres optimisations.

Plusieurs points posent des défis industriels à Celestron. Par exemple, à cause de la profondeur de champ extrêmement faible d'un RASA, il faut garantir une mise au point ultra précise et un capteur parfaitement  perpendiculaire à l'axe optique. Le premier RASA (11") sera mis sur le marcher par Celestron en 2014. Suivront un 8", 14" et 36".

Vue en coupe d'un astrographe Celestron RASA

En 2024 l'astrographe Origin de Celestron est donc le petit (6") dernier de la famille des RASA produit par Celestron depuis 2014.


Source Celestron (en anglais): pdfvidéo

Présentation du RASA 11" à sa sortie (fin 2014)

Vidéos (pour mieux comprendre le contexte): Rowe, Hedrick.

Publications auxquelles ont participé Rowe et Ackermann.